Le passé fantasmé

de l'Histoire de la France - 2

Ce chapitre doit sa substance à l'important ouvrage de Anne Lombard-Jourdan, Aux origines de carnaval, un dieu gaulois ancêtre des rois de France, Odile Jacob, 2005

J'en citerai certains passages longuement. Je lui rends ainsi hommage.

 

" La recherche des origines est comme la quête du père.

Elle attire certains historiens et d'autres la récusent. " (p. 238)

 

« Redisons-le avec insistance : l’Homme a incontestablement une origine unique, tropicale et africaine. Avant d’être devenus européens, asiatiques ou américains, nous étions, incontestablement, tous africains. »

Yves COPPENS, Le présent dupassé, Odile Jacob, 2009, p. 32.

 

Si les rois sont d'abord des fils de rois selon le principe dynastique, le " mythème génétique " défini par Laurent Guyénot (La mort féerique. Anthropologie du merveilleux. XIIe-XVe siècle, Gallimard, 2011) est réservé à l'ancêtre fondateur de la lignée. Les dynasties scandinaves ou anglo-saxonnes se réclament ainsi d'un ancêtre né d'Odin.

Le chroniqueur Frédégaire (continuateur de Grégoire de Tours, au milieu du VIIe siècle) assigne une conception fabuleuse à Mérovée, le héros éponyme de la dynastie franque : il serait né de l'union de l'épouse de Clodion qui se baignait dans la mer avec un dieu, une Bistea Neptuni, un Quinotaure, un dieu fluvial cornu, une bête marine mi-homme, mi-taureau.

 

" Le but du présent ouvrage sera, disons-le tout de suite, d'identifier "le dieu-père de tous les Gaulois" avec Cernunnos, dieu géant aux bois de cerf, dont l'effigie accompagnée d'une inscription à son nom, fut sculptée pour la première fois à l'époque de Tibère sur le Pilier des Nautes à Paris. " (p. 14)

Le Pilier des Nautes d'une hauteur de 5 m
Musée de Cluny - Paris
http://fr.wikipedia.org/wiki/Pilier_des_Nautes

http://jfbradu.free.fr/celtes/les-celtes/cadre-art-gallo-rom.php3?#Pilier des Nautes

Dis Pater : dieu archaïque, dieu-père, dieu chthonien, dieu de la fertilité et des morts. Ainsi était aussi le dieu-ancêtre des Gaulois
Ce dieu (C)Ernunnos, " le dieu au front coiffé de bois de cerf ", adopté par les Romains, est représenté pour la première fois au début du 1er siècle, entre 14 et 17, par une sculpture nommée (C)ERNUNNOS sur le " Pilier des Nautes " édifié à Lutèce par les nautes ou bateliers fluviaux du territoire des Parisii et où se côtoient les dieux gaulois et les dieux romains dans un esprit de conciliation et d'entraide.


Tapisserie 2 : La Fontaine

II - Les "origines" gauloises

des rois de France ?

1- L'effacement, l'oubli...

 

" Comment expliquer l'oubli et le long silence qui ont recouvert ces origines essentielles ?

Les premiers responsables furent les druides qui confiaient pratiquement tout à la mémoire et interdisaient l'usage de l'écriture. César ne pouvait se taire sur des sujets aussi primordiaux que le sanctuaire médian et le dieu-père des Gaulois ; mais il n'avait pas intérêt à en dire trop long sur des vérités dont le souvenir aurait pu entretenir chez le peuple récemment soumis la nostalgie de sa liberté passée et provoquer des résistances et des rébellions analogues à celles dont les premiers siècles offrent plusieurs exemples.

[Galli se omnes ab Dite patre prognatos praedicant idque ab druidibus proditum dicunt. — Tous les Gaulois se prétendent issus du Dis pater, tradition qu'ils disent tenir des druides. " (Commentarii de Bello Gallico, VI, 18, 1 - Commentaires sur la Guerre des Gaules)]

Quant aux auteurs chrétiens, ils adoptèrent pour des raisons différentes, un égal parti pris de mutisme. Par crainte de perpétuer et de propager les croyances et les pratiques païennes qu'ils réprouvaient, ils évitèrent soigneusement d'en parler. En Gaule, les traditions orales qui couraient encore aux premiers siècles de notre ère, n'eurent pas la chance d'être consignées comme en Irlande par les soins des premiers moines.

Enfin, les Francs nouveaux venus, peu nombreux mais maîtres puissants et tôt christianisés, monopolisèrent l'attention. Au VIIe siècle, ils se virent curieusement affubler d'origines troyennes et leurs rois furent dotés d'un ancêtre nommé Faramund. Les Gaulois disparurent de l'histoire écrite. " (p. 14)

 

2- Cernunnos

A l'arrivée des Romains, les Gaulois vénéraient Cernunnos, dieu à la tête ornée de bois de cerf.

http://jfbradu.free.fr/celtes/les-celtes/cadre-art-gallo-rom.php3

Cernnunos jeune et imberbe est assis à la gauloise entre deux jeunes gens.

Ils touchent d'une main la tête des serpents qui les soutiennent et de l'autre la ramure du dieu.

Ces gestes affirment le rapport existant entre les serpents et la nouvelle jeunesse du dieu.

Stèle (Haut-Empire) de Vendœuvres-en-Brenne (Indre) - Musée de Châteauroux

 

Pour Anne Lombard-Jourdan, " Gargantua et Mélusine sont les avatars de divinités indo-européennes conservées par les Celtes et tiennent au vieux fonds mythologique de la Gaule protohistorique. " Ainsi, les chapitres III, IV et V de Gargantua sont un " pastiche du mythe du cerf et du serpent. "

" Quand changent les religions, on constate, toujours et partout, que la nouvelle se love aux endroits déjà sacralisés par l'ancienne. " (p. 14)

http://www.ceisiwrserith.com/therest/Cernunnos/cernunnospaper.htm

 

Le cerf

Il y a de l'étang
Dans les yeux du cerf.

Eugène Guillevic, Du domaine

 

"Aucune bête n'a plus que le cerf aidé l'homme primitif dans ses efforts pour exister dans un monde hostile. Il était omniprésent dans toutes les circonstances de sa vie et de sa mort.

Pas un pouce de son corps qui n'ait servi à quelque chose : chair, viscères, moelle étaient consommés ; os, bois, tendons étaient utilisés pour fabriquer des vêtements ou des outils ; les bois pilés servaient de remèdes ; certaines parties de son corps : " os du cœur ", " crochets " ou canines atrophiées ramures du cerf ou simples rondelles taillées dans ses meules, étaient considérées comme des talismans possédant des vertus magiques et garantissant santé, force et fécondité.

Les bois de cerf étonnaient par le mystère de leur renouvellement annuel, lequel permettait la longévité de l'animal et, croyait-on, son immortalité. Leur possession assurait le transfert à leur détenteur de la force physique et procréatrice des bêtes qui les avaient arborés. Ils étaient gages de virilité, de fécondité, de richesse, de renaissance et d'épanouissement. Ils éloignaient les sortilèges, les maladies, l'impuissance, le mauvais œil. On leur accordait déjà cette vertu dès 4 500 ans avant notre ère.

Quant aux rondelles taillées dans les meules ou sections rénovatrices à la base des bois, gonflements en forme d'étoiles considérés comme le signe même de la force de la nature chaque année renaissante, on les portait sur soi pendant la vie et dans la tombe. II était recommandé d'en avoir une la nuit des noces.

Dans son testament, "le Lingon" recommande de brûler en même temps que son corps, son attirail de chasse, son canot et " toutes les étoiles en cornes d'élan ". On a trouvé de ces rondelles percées d'un trou de suspension dans des tombes gallo-romaines, mérovingiennes et carolingiennes, en Gaule, en Allemagne du Nord et en Hollande. " (p. 19)

Cernunnos subvient aux besoins des humains : il agit en " père ", le " Dis pater " de Jules César : responsable et solidaire.

" Le cerf fut toujours un animal vénéré. La multiplicité de ses figurations depuis la préhistoire en Europe occidentale en est la preuve. " (p. 91). Les Magdaléniens ont laissé les plus anciennes figurations de personnages masqués : " Le Sorcier de la grotte des Trois-Frères " en Ariège

http://fr.wikipedia.org/wiki/Grotte_des_Trois-Fr%C3%A8res

Un sorcier ? Un chaman ? " L'Esprit de la chasse " ?

 

Jetons représentant Diane conduisant un char tiré par des cerfs
datés de - 143, - 90 et - 71


Déesses de bronze trouvées :
1- à Besançon - à voir au British Museum - Londres
2- dans le Puy-de-Dôme - Musée de Clermont-Ferrand

Colonne de Dobrteša (Croatie)
portant une dédicace au dieu Carvonia

Le cerf et le serpent

 

Détail d'une illustration du Physiologus de Berne
2nd tiers du IXe siècle

Mosaïque de pavement d'église
540 ap. n.è.
Musée de Qasr el-Lebya - Libye

 

Plaque de bouclier, en forme de cerf - 600 av. n.è. - Musée de l'Ermitage - Saint-Pétersbourg

Les analogies entre le cerf et le serpent ont été notées de tous temps : le serpent mue au printemps et devint lui aussi symbole de régénération et d'immortalité. Tous deux aiment l'eau.

Affaibli par l'hiver et un jeûne obligé, le cerf, croyait-on, mangeait après combat un serpent qui lui transmettait alors les forces venues des entrailles de la terre. Anne Lombard-Jourdan écrit : " C'est là une des versions de la vision dualiste du cosmos, dont l'unité repose sur l'union de deux principes opposés et complémentaires, masculin et féminin, qui s'affrontent, puis s'allient. Les deux mondes, supérieur et inférieur, sont également nécessaires à l'équilibre cosmique. " (p. 21)

" Naribus alipedes ut cervi saepe putantar
ducere de latebris serpentia saecla ferarum. "

" …aussi ne faut-il pas croire que la porte d'Orcus s'ouvre dans ces régions et que par là les âmes soient attirées par les dieux mènes aux bords infernaux de l'Achéron, comme les cerfs aux pieds ailés attirent par leur simple souffle, dit-on, les serpents hors de leurs retraites, régénération des bêtes sauvages. A quel point ces fables sont contraires à la vérité, apprends-le, car c'est ce sujet même que je vais traiter. " Lucrèce, De natura rerum, livre VI, vers 764-765

Bestiarium - v. 1200-1210
Royal, ms. 12 F xiii, f. 19 - British Library


" Le thème du combat d'un dieu ou d'un héros contre un serpent ou un dragon fait partie de toutes les mythologies du globe. Les adversaires mis en présence sous l'aspect dramatique d'un combat sont deux forces complémentaires, produit du dédoublement d'un même sacré. Le cerf ouranien éveille et réchauffe de son souffle la serpente chthonienne après les rigueurs de l'hiver. De leur combat annuel, que scelle finalement leur conjonction, vient l'équilibre de la nature. Ce moment-clé est signalé aux hommes par la chute des bois du cerf, qui annonce sa décrépitude et sa proche régénérescence. " (p. 28)

Anne Lombard-Jourdan conclut ainsi cette relation cerf-serpent : " le cerf est le " vrai contraire " du serpent. " (p. 24)

Le chaudron cultuel d'argent de Gundestrup
trouvé en 1891 au Jutland (Danemark) et conservé au musée de Copenhague

Le gobelet d'argent aux dieux gaulois, trouvé à Lyon

En pleine période gallo-romaine, les Gaulois continuent à honorer des divinités animales, mi-animales ou mi-humaines.
Ici : Toutatis et le sanglier - Cernunnos et le serpent

Eglise Saint-Patrice, Saint-Parize-le-Châtel (Nièvre)- chapiteau de la crypte
Rapace, sciapode s'abritant sous son pied, tortue, centaure sagittaire casqué

Sur le même ensemble, le cerf et un reptile sont adjoints.

N'est-ce pas aussi le cas ici, dans la conjonction du cerf et de la hyène,
sorte de gargouille au cou tendu (aux coups tordus !) ?

Et rapprochons cette image de la remarque d'Anne Lombard-Jourdan selon laquelle bien de villes possédaient un animal fabuleux et terrible, chacun avec son histoire. Bourges avait sa " Grand Bête ", parente de la " Gargouille" de Rouen et de la " Tarasque" de Tarascon, du "Kraulla " ou " Grand Baîlla " de Reims, du " Graouilli " de Metz, du " Crocodile " de Niort, et de la " Grand' Gueule " de Poitiers. A Paris, le dragon de saint Marcel sortit de Notre-Dame pour déambuler dans les rues lors des rogations jusqu'en 1730.

http://www.mythofrancaise.asso.fr/mythes/figures/Gargouille.htm

http://www.france-pittoresque.com/traditions/24.htm

 

Le cerf et la licorne ensemble

 


Licorne. Français 22533, fol. 305 v.

Le roi Nabuchodonosor rêve d'un arbre qui doit être coupé
Illustration extraite du Speculum Humanae Salvationis
(Allemagne ?) - v. 1400-1500
Museum Meermanno Westreenianum - La Haye - mmw, 10 c 23 - fol. 27v

Parmi les songes du roi Nabuchodonosor que le prophète Daniel réussit à interpréter, il en est un qui met en scène un arbre d'une hauteur immense : les oiseaux perchent sur ses branches et les animaux terrestres s'abritent sous son ombre ; mais un ange ordonne d'abattre l'arbre, symbole de l'orgueil du roi (Livre de Daniel, chapitre 4).

À Rouen en 1508,lors de l’entrée du roi Louis XII et de la reine Anne de Bretagne, le cerf et la licorne sont unis :

« Auprez d’icelluy monastere, jouxte l’eglise Saincte Croix, estoit eslevee une petite establye bien proprement accoustree, et en icelle estoit une motte de terre, sur laquelle estoyt ung escu my party de France et de Bretaigne soubz une couronne ; de costé d’icelluy escu ung cerf, d’aultre costé une lycorne, bien faicts a merveilles, et lesquelles bestes soustenoyent ledict escu en mouvant leurs testes et les inclynant vers le Roy. En icelle establye estoyt escript ce que s’ensuyt :

Quand la Lycorne et le grand Cerf
L’armarye tiennent ensemble, [armoiries]
Il n’est ennemy qui ne tremble
Et qu’ilz ne rendent a eux serf. 
»

Pierre Le Verdier, « L’entrée de Louis XII et de la reine Anne à Rouen (1508) », Société des Bibliophiles Normands, Rouen, 1900, p. 23-24. https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k56035804.texteImage

 

3- Cernunnos,
ancêtre des rois de France

 

" Les délicates questions d'origine, disait Albert Grenier, sont de celles qu'évite généralement un historien prudent. " Mais, et cette fois c'est Marc Bloch qui parle : " L'horreur du risque et de la responsabilité n'est pas en érudition plus qu'ailleurs un sentiment bien recommandable. "

" Pour les époques anciennes, le rôle de l'historien, à quelque sujet qu'il s'attache, ne se limite pas à présenter, classer et commenter des textes. Il lui incombe aussi de combler les lacunes d'une documentation clairsemée, par des évidences, des conjectures plausibles et soumises à contrôle et même, au besoin, par des hypothèses, qui récapitulent les possibilités et éclairent pour d'autres le chemin à suivre vers la vérité.
Toute source déjà utilisée et qu'on pouvait croire épuisée, doit être examinée à nouveau : une optique et un questionnement différents génèrent des surprises gratifiantes. Un prudent recours à la comparaison et à la généralisation aide à comprendre les situations assimilables. " (p. 15)

 

Généralement, chaque pays possède une légende fondatrice de son origine.

Dans les pages précédentes, nous sommes partis, vous et moi, à la quête des origines de la France, ce malgré le manque d'historiens antiques ou du très Haut Moyen-Âge. Nos racines furent troyennes au VIIe siècle : longtemps, les Français se voulurent les descendants de Francion le Troyen et des Francs.

" Il est vrai que la conquête franque agit comme un catalyseur dans une Gaule romanisée et qui avait, semblait-il, perdu le souvenir de son indépendance et de ses ancêtres. Ce petit peuple barbare et son chef Clovis trouvèrent en s'installant dans le pays la stabilité qu'ils souhaitaient et la profondeur historique qui leur manquait. Faibles en nombre, les Francs fusionnèrent sans difficulté avec la population gallo-romaine. Et Clovis scella cette conjonction en choisissant Paris, centre religieux de l'ancienne Gaule, comme capitale de son royaume, et le dieu-père indigène comme protecteur.
Le mythe de l'origine des Francs fut donc institué, et chacun se montra plus ou moins persuadé de son exactitude. Bien plus, on créa de toutes pièces un roi franc Faramund ( " Protection du pays "), chargé de tenir le rôle du dieu-père gaulois. II devint l'aïeul de tous les rois de France. En diffusant le récit fantaisiste des migrations successives des descendants de Priam depuis la Pannonie, les clercs flattaient les maîtres du moment et oblitérèrent du même coup le passé gaulois. " (p. 233)

" Cernunnos, divinité ancestrale de tous les Gaulois devint l'aïeul des dynasties successives qui régnèrent sans interruption sur le territoire de la France et qui toutes furent soucieuses de justifier les liens qui les unissaient entre elles. L'ancêtre " commun ", mais non ouvertement revendiqué, servit à justifier la légitimité des souverains et à susciter chez leurs sujets cette adhésion sentimentale que toute autorité politique doit nécessairement inspirer, mais qui, en France, fut plus étroitement réalisée qu'ailleurs.

La paternité commune à tous du dieu-cerf se restreignit à celle de la seule famille royale. La croyance en l'héritage génétique de cet aïeul divin " aux bois de cerf " fut assez forte pour que les rois de France s'emploient à guérir les écrouelles pendant des siècles. C'est à cause de cet aïeul lointain que Mérovingiens, Carolingiens, Capétiens, Valois et même les Bourbons eurent le souci permanent de justifier les liens de parenté qui unissaient chacune de leurs familles à la dynastie précédente. La continuité parfaite de la lignée royale devait être assurée pour que la représentativité et le pouvoir thaumaturgique soient conservés à tous les descendants du même ancêtre surnaturel. " (pp. 137-138)

Grandes Chroniques de France - Saint Louis et Saint Denis
BnF, Ms. fr. 2608. fol. 1. (bas de la page)


Les chroniques relevent des exemples "d'apparitions" d'un cerf à des moments-clé à Clovis, Dagobert, Charlemagne, Philippe-Auguste, Charles VI (le songe de Senlis noté par Froissart).

A partir du 15ème siècle, le cerf devient un élément important de l'emblématique royale française. Sous le règne de Charles VI (1380-1422), le cerf ailé (appelé cerf volant ou cerf de justice, dont les ailes soulignent la promptitude de la justice royale) apparaît pour représenter le roi.

Le cerf blanc ailé, avec la couronne autour du cou, représente Charles VI.
Ses 20 cors correspondent à l'âge du jeune roi : 20 ans
Le cadre est bordé de demi-fleurs de lys.
Le cerf est sur un fond de gueules (rouge) et de sinople (vert)
Le " jeune cerf blanc couronné " est le " maître du parc des blanches fleurs dorées "
auquel Philippe de Mézières dédie son Songe du vieil pèlerin - vers 1390
BNF - Arsenal - ms. 2682, f. 34


Charles VII conserva cette devise ; son fils Louis XI l'abandonna ; Charles VIII et Louis XII la reprirent comme support de leurs armes, ainsi que les ducs de Bourbon.


On trouve l'image du Cerf Volant sur de nombreux monuments dont furent propriétaires les ducs de Bourbon.

L'arrivée de Jeanne d'Arc (qui est à l’origine du sacre de Charles VII) à Chinon
tapisserie suisse - 15è. s., Orléans, Hôtel Cabu


La présence d'un cerf symbolise la résurrection
et affirme que le Christ est le guide et le soutien de l'action de Jeanne.

 

La tapisserie des Cerfs ailés

La tapisserie des Cerfs ailés
entre 1453 et 1461 - Musée - Rouen

Le grand cerf ailé au milieu de l'enclos central représente le roi Charles VII (1422-1461) au repos dans son royaume que l'enclos circulaire délimite et qu'identifie l'écu aux fleurs de lys accroché par la guiche au clayonnage. Les iris et les roses renvoient aussi à Charles VII "Le Victorieux" : ces fleurs étaient ses attributs personnels. Il est rejoint dans l'enclos par deux autres cerfs ailés plus petits, qui entrent dans le royaume de France : ce sont les provinces de Normandie et de Guyenne, occupées par les Anglais et reconquises après les batailles de Formigny (1450) et Castillon (1453). Ce peut être aussi les deux fils de Charles VII : le dauphin Louis et son frère Charles, duc de Berry.

 

Devant l'enclos, deux lions représentent certainement le duc de Bourgogne, Philippe III, dit Philippe le Bon, et le roi anglais Henry VI assistant impuissants à la perte de ces deux provinces.

 

Le manuscrit Le Gouvernement des princes

Bérault Stuart d'Aubigny, capitaine de la garde écossaise de Charles VIII, commanda un manuscrit, le Gouvernement des princes dont le frontispice le représente à cheval avec son emblématique personnelle : "un lion rampant, rouge sur fond d'argent, avec de nombreuses boucles" semées dans les broderies des sayons et des casaques, boucles destinées à montrer sa volonté d'œuvrer à unir les deux royaumes français et écossais face à l'Angleterre, l'ennemi commun.

Sa sentence "Distantia jungit", son écu qui a pour cimier la licorne écossaise et pour tenants les cerfs ailés de France confirment cette volonté d'union des rois de France et d'Ecosse.

http://www.histoire-fr.com/valois_charles7_4.htm

http://fr.wikipedia.org/wiki/B%C3%A9rault_Stuart_d%27Aubigny

Dans la Grand'Salle (aujourd'hui, Salle des Pas perdus) du Palais de la Cité à Paris, existait, à l'initiative de Philippe le Bel, une suite de statues des rois de France depuis Faramond. Un grand cerf en ronde-bosse figurait parmi ces statues, entre Louis XI et Charles VII. Plus loin, était accrochée la dépouille d'un long reptile naturalisé, " draco " ou " anguis ", " lézarde " ou " crocodile ". Ainsi revenait en écho le couple cerf-serpente, qui se retrouvait aussi à la Sainte-Chapelle et au palais de Jean le Bon et Jean de Berry à Bourges.

" Le cerf avait au Moyen Âge une grande puissance symbolique. A l'époque gauloise, il était associé à Cernunnos, dieu de la mort et des richesses souterraines. Il était lié aussi à l'idée de justice puisque symbole du roi […]

Le thème du cerf ailé ou volant était déjà dans l'air à la fin du XIVe siècle. Sans doute ne faut-il pas chercher l'origine de ces ailes ailleurs que dans une augmentation d'intensité de ses qualités physiques.

Déjà dans l'Antiquité, on vantait sa vélocité extrême : Lucrèce, Virgile, Ovide parlaient de cervi alipedes ou de cervi volucres. Les ailes le rendaient plus rapide encore ; elles accentuaient son caractère d'animal surnaturel et psychopompe. Dans la littérature médiévale, le cerf conduisait les morts vers l'Autre monde ; il entraînait les héros pour leur révéler des vérités cachées ou les guider vers une destination enchantée ; il pouvait être oraculaire.

Il semble que Charles VI ait emprunté à son oncle, Louis II de Bourbon (1337-1410), l'emblème du cerf ailé que celui-ci avait sans doute emprunté en Angleterre et qu'il utilisait "n'ayant mot aucun qui lui donnast lumière ". Le songe de Charles VI lui donna un sens et Froissart une histoire. Le " cerf volant couronné d'or au col " devint l'animal symbolique des rois de France, qui l'adoptèrent comme support de leurs armes. Vers la même époque, le roi d'Angleterre Richard II (1377-1399) eut, comme Charles VI, pour emblème un cerf blanc. " (p. 155)

" Le cerf du songe de Charles VI avait des ailes, mais pas de collier. Le collier doré qui entre dans l'élaboration de l'emblème royal participait à une autre tradition héritée du passé gaulois. C'était la torque d'or (on dit la ou le torque) qui ornait le col du dieu " aux bois de cerf " sur toutes ses effigies. C'était un signe sacré indiquant puissance et autorité. " (p. 155)


Statue tricéphale de Cernunnos portant le torque
IIème siècle ap n.è.
trouvée à Condat-sur-Trincou (Dordogne)

http://jfbradu.free.fr/celtes/les-celtes/cadre-art-celtes.php3

http://jfbradu.free.fr/celtes/index-celtes.php3

détail du chaudron de Gundestrup

Henri Baude (1415-1490 ? ) auteur de poèmes satiriques. Il fut l'un des protagonistes de la Praguerie qui eut lieu de février à juillet 1440, révolte des princes dont le futur Louis XI de France fut le chef. Il revint sur ses intentions et se remit au service de Charles VII de France.

sous l'apparence d'un chien, Henri Baude hésite entre deux partis : rester fidèle au roi Charles VII, le grand cerf, ou suivre le dauphin rebelle, Louis futur XI, le petit cerf.

Les pattes antérieures du chien hésitant bondissent en avant, les pattes postérieures restent au sol.

BNF, ms. latin 6222, fol. 36 - in Anne Lombard-Jourdan, Aux origines de carnaval

 

On ne possède, semble-t-il, aucune représentation des armoiries de Charles VI avec pour supports les deux cerfs ailés. Ils apparaissent sous Charles VII et Louis XI et seront remplacés plus tard par des anges ou par saint Michel.

 

La guérison des écrouelles

 

Marc Bloch le précise grâce aux documents dans Les Rois thaumaturges (1924 et Gallimard, 1983) : de Robert le Pieux (996-1031) à Charles X, couronné en 1825, tous les rois de France soignèrent les écrouelles ; ils montrèrent en même temps leur sollicitude pour leurs sujets souffrants et le caractère surnaturel de leur pourvoir royal.

Le mot " écrouelles " vient du latin scrofa = truie. L'étymologie exprime l'aspect dégoûtant des symptômes et a donné scrofule et scrofuleux. La maladie est également appelée, en latin, struma ou morbus regius = mal royal, d'où dérive le français le mal le roi et l'anglais King's evil.
Les écrouelles sont une maladie d'origine tuberculeuse (adénopathie cervicale tuberculeuse chronique) provoquant des fistules purulentes localisées sur les ganglions lymphatiques du cou. Elle se nomme aussi scrofule.

Quel point commun avec le cerf ?
Aux deux côtés du cou du cerf se trouvent des glandes lymphatiques qui forment une série de " nœuds ". Le même mot sert à désigner la chair environnante. Les traités médiévaux de vénerie nomment " nœuds du cou " la chair cerf située aux côtés du cou et jointe aux épaules sur une longueur de trente centimètres environ. Elle faisait partie des " menus droiz ", fins morceaux réservés au " maître de la chasse ".

A la sortie de l'hiver, le cerf est affaibli ; très sensible aux mycobactéries responsables des différentes tuberculoses, le cerf sent ses ganglions rétropharingiens et ses amygdales gonfler et s'enflammer, provoquant des abcès fistuleux, qui peuvent s'étendre au thorax et à l'abdomen.
" On avait également remarqué que le cerf, guidé par son instinct, se soignait en mangeant un serpent, puis en buvant abondamment. Et on avait pu constater que, désormais purgé, il rajeunissait et que ses bois et son poil repoussaient plus beaux qu'auparavant. Celse apprend qu'au 1er siècle de notre ère, les " gens de la campagne " (rustici), à l'instar du cerf, mangeait un serpent pour réparer leurs forces. " (p. 179)
Les hommes et les porcs en mauvaise santé souffraient des mêmes lésions. La truie avait la réputation de manger les serpents.
" Ceci est à mettre en rapport avec la personnalité mythique de l'animal qui, sur certains points, s'apparente à celle du cerf. La tuerie du cochon, rituelle et communautaire, et le lexique cohérent qui y est attaché, rappellent la mise à mort et le dépeçage du cerf. Au temps de Louis-Philippe, on donnait encore en Normandie, le nom de " fête à la courée " au repas qui suivait la mort du cochon et où étaient servis tous les abats qui ne vont pas au saloir. " (p. 179)

 


Jean Fouquet - Le toucher des écrouelles - Heures du roi Henri II
BnF - département des Manuscrits - Latin 1429, fol. 107v.

Dans ce livre d'heures, cette image précède un office de saint Marcoul. Dans une église de style Renaissance qui évoque, théoriquement l'église de Corbény près de Reims, le roi Henri II touche pour la première fois les écrouelles après son sacre. Le roi est au centre de l'image. Les scrofuleux, deux par deux, hommes et femmes, forment une longue file derrière le couple agenouillé aux pieds du roi. Celui-ci fait le signe de la croix sur le front de l'homme qui a posé son bâton et le foulard qui cache normalement ses tumeurs au cou. L'attitude émerveillée des assistants laisse supposer un miracle. À droite, un huissier portant masse et un ecclésiastique de haut rang.

http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89crouelles

 

Carnaval


" Répétons-le une fois encore : à la sortie de l'hiver, le cerf mange le serpent, puis boit abondamment et dès lors rajeunit. L'événement annonce l'explosion vitale de la végétation et de la faune et le retour du printemps. Cernunnos, " le dieu-père aux bois de cerf " a remis en branle le mécanisme du monde et assuré la continuité de l'Univers.

Mais, pour assurer cette " re-naissance ", un rite doit chaque année réactualiser le mythe. L'homme doit s'associer et aider au retour cyclique du printemps : c'est Carnaval. Le dieu-père a délégué ses pouvoirs au roi, son descendant et son héritier, qu'il règne en France ou en Angleterre. Celui-ci a la tâche d'entretenir la vie, d'assurer la santé défaillante des hommes, de guérir les écrouelles. Le " toucher royal " était considéré comme garant de l'existence et de la santé de la collectivité, et on comprend mieux dès lors, l'attachement viscéral que lui portaient les populations. " (p. 182)

 

4- Le cerf et le christianisme

 

 

" Le Christ : " le cerf des cerfs " parangon de tous les catéchumènes " (p. 43)

 

" On reste stupéfait de l'abondance des comparaisons symboliques et didactiques que la réflexion médiévale put établir entre la nature et les comportements du cerf et ceux de l'homme.

Considéré comme psychopompe et prophétique, le cerf, figure majeure de l'univers celtique, conduisait l'homme dans l'Au-delà, dévoilait les secrets et révélait les trésors. Sous cet aspect aussi, il passa dans l'univers chrétien ; il décela l'emplacement des reliques, indiqua les lieux où devaient être fondés les sanctuaires, provoqua des conversions.

Jadis monture de l'enchanteur Merlin, il fut domestiqué et chevauché par des saints, tels saint Edern et saint Hélo en Bretagne ou sainte Mildred en Angleterre. De futurs abbés utilisèrent sa peau taillée en fines lanières mises bout à bout pour délimiter les étendues considérables qu'ils voulaient se faire concéder. Eustache, Julien puis Hubert, chasseurs invétérés, se trouvèrent soudain en présence d'un grand cerf dans la forêt et leurs chiens s'immobilisèrent tout à coup. Ce face-à-face solennel a inspiré aux artistes bien chefs-d'œuvre.

Quelquefois le cerf porte un crucifix entre ses bois et il prend la parole : à Eustache il dit : " Pourquoi me poursuis-tu ? Je suis Jésus-Christ que tu honores ignorament " ; et à Julien : " Tu me poursuis, toi qui tueras ton père et ta mère. " (p. 27)

Charles VIII dédia la chapelle du château d'Amboise à saint Hubert. Un bas-relief sur un linteau de porte montre le cerf, poursuivi par les chasseurs et les chiens, une croix entre les ramures : représentation de Jésus. Ce thème christianisant vient du folklore de l'Inde, voire de l'Arménie.

Avec le christianisme, la ramure du cerf fut attribuée au diable !


Psautier de Paris Eadwine - BnF
Le Christ tenté par un shaman-diable aux bois de cerf

Le Psaume 42 (2-3) interpréta le mythe du cerf et du serpent et le christianisme s'appropria une partie du symbolisme du cerf pour développer des thèmes de la nouvelle religion et attirer ceux qui étaient restés fidèles aux mythes anciens.

Version Louis Segond :
Comme une biche soupire après des courants d'eau, Ainsi mon âme soupire après toi, ô Dieu !
Mon âme a soif de Dieu, du Dieu vivant : Quand irai-je et paraîtrai-je devant la face de Dieu ?

Version Abbé Crampon :
Comme le cerf soupire après les sources d'eau, ainsi mon âme soupire après toi, ô Dieu.
Mon âme a soif de Dieu, du Dieu vivant : quand irai-je et paraîtrai-je devant la face de Dieu ?

 

" La mythologie chrétienne du Moyen-Âge se présente bien en définitive comme une mythologie païenne christianisée. " (Philippe Walter)

 

" La chasse au cerf était la réactualisation symbolique du geste archétypal qui tuait l'animal pour l'offrir au dieu des animaux avant de partager son corps et de le consommer en groupe. Longtemps répété et transmis par tradition, le rituel fut codifié dans les traités de vénerie à partir du XIIè siècle. II s'est perpétué jusqu'à nos jours presque intact et conserve un quelque chose qui n'est pas entièrement profane.

Le dieu " aux bois de cerf " et la serpente aquatique et nourricière, désormais dissociés, poursuivirent parallèlement leurs carrières dans la Gaule profonde, personnifiés en géant Gargantua et en fée Mélusine. On les retrouve ensemble dans le Berry. L'Église contribua sans doute à les séparer en christianisant le cerf avide de l'eau du baptême et en infernalisant la serpente, devenue créature de Satan. C'est à ce prix qu'ils purent survivre, vestiges adultérés et désolidarisés des protagonistes de l'ancien mythe.

Le blocage ecclésiastique dut être bien puissant pour tenir en respect les aspirations nostalgiques des peuples attachés à leurs croyances et à leurs traditions. Les clercs, maîtres de l'écrit, décidèrent de faire disparaître celles-ci en observant à leur égard un silence presque absolu. Ils censurèrent et remanièrent les chansons de geste et les romans courtois eux-mêmes, avant de les confier aux jongleurs, dont ils se méfiaient. Très religieuse, la cour capétienne laissa faire. On notera que certains sujet comme la lutte du cerf et du serpent, Gargantua, la Mesnie Hellequin, la guérison des écrouelles, furent presque totalement bannis de l'iconographie médiévale. " (p. 237)

 

5- La Passion... de la chasse...

 

 

La chasse au cerf


Les Gallo-romains poursuivirent l'habitude gauloise de la chasse au cerf.

A l'exception de Henri III, tous les rois du 16e siècle ont été des chasseurs passionnés. Charles VIII, pour qui Guillaume Tardif rédige un Traité de l'art de la fauconnerie, préfère le vol et dépense plus de 20 000 Livres pour ses chasses. Louis XII, également fervent du vol, possède quatre douzaines d'éperviers. Mais il aime aussi chasser " à cor et à cris ".

Quant à François 1er, son surnom de " père des Veneurs " paraît entièrement justifié car c'est apparemment à son initiative que l'on commence, à cette époque, à courre le cerf en toute saison. " Mais ce fut sous les derniers Valois que la chasse au cerf atteignit la perfection. On se préoccupa d'aménager les forêts en vue de la chasse à courre, qui réclame des forêts ouvertes, des futaies hautes, des fourrés riches mais pas trop épais, pour permettre la course des chevaux. François 1er, considéré comme " le père de la Vénerie ", mourut à Rambouillet, le 31 mars 1547. Il déclarait : " Vieux et malade, je me ferai porter à la chasse, et peut-être que mort je voudrai y aller dans mon cercueil." Pour le seul plaisir de les contempler, il fit transporter, en 1529, certains de ses bois de cerf du château de Blois à celui de Fontainebleau. " (p. 98)

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Dès lors que la licorne appartient à la symbolique du Christ, la chasse à la licorne, parodiant toute chasse de poursuite et d'hallali (cerf, sanglier) pouvait être la représentation de La Passion christique.


miniature du Livre des Merveilles de Marco Polo
La chasse à la licorne blanche - vers 1410 - BNF

L'artiste (Jean Perréal ?) a dû participer dans ses jeunes années à une telle chasse royale ou princière. Aucune phase de cet événement ne lui était donc étrangère. De plus, certains livres étaient consultables comme :

— 1. Henri de Ferrières - Livres du roi Modus et de la reine Ratio (attribution incertaine) - entre 1354 et 1376 - Prose en français, à l'exception du prologue, du chapitre 118 et de l'épilogue en vers.

— 2- Gace de la Buigne - Le roman des deduis - entre 1359 et 1377 - dédié à Philippe II le Hardi, duc de Bourgogne (1342-1404) - 12210 vers octosyllabiques à rimes plates en français

Incipit : " Gace de le Buigne, jadiz premier chapellain de tres excellent [prince], le roy Jehan de France, que Dieu assoille, commença ce Ronma[nt] des deduis a Heldefort en Engleterre l'an mil CCCLIX du com[mandement] du dit seigneur...
Ycy commence le Ronmans des deduis.
Entens cy, tu qui veulz savoir
des faucons et les veulz avoir
bons, hautains et bien entechiez!... "

— 3- Gaston Phœbus (Gaston III dit Fébus ou Phébus, Phœbus, 1331-1391, comte de Foix, vicomte de Béarn) - Le Livre de la chasse - entre 1387 et 1391 - Prose en français - Traité sur la chasse inspiré notamment des Livres du roy Modus et de la royne Ratio d'Henri de Ferrières.

— 4- Jacques de Brézé (v1440-1494) - La Chasse - après 1481- 55 strophes de 10 vers en français

Incipit : " La Chasse faicte et composee par messire Jacques de Breszé grant seneschal de Normandye.
La veille d'une Saincte Croix
de may, au matin me levay,
mon lymier au poing pour au boys
aller en queste ou je pourray,
pour veoir se je rencontreray
de cerf qui me plaine a chasser... "

Éditions modernes
- Le livre de la chasse du grand sénéchal de Normandie, éd. Jérôme Pichon, Paris, 1858.
- Jacques de Brézé, La Chasse, les Dits du bon chien Souillard et les Louanges de Madame Anne de France. Éditions critiques publiées par Gunnar Tilander, Lund, Blom (Cynegetica, 6), 1959, 100 p.

— 5- Jacques de Brézé - Dits du bon chien Souillard - après 1481 - 50 vers en français - Bibliothèque nationale de France, 12398, f. 145-145v, XV.
Incipit : " Je suis Souillart, le blonc et le beau chien courant,
de mon temps le meilleur et le mieulx pourchassant... "

Édition ancienne
Jacques de Brézé, Le Livre de la chasse du grant seneschal de Normendie. Les Ditz du bon chien Souillard qui fut au roy de France, XIe de ce nom, Paris, Pierre Le Caron, v. 1494, 12 f.
Éditions modernes
Jacques de Brézé, La Chasse, les Dits du bon chien Souillard et les Louanges de Madame Anne de France. Éditions critiques, éd. Gunnar Tilander, Lund, Blom (Cynegetica, 6), 1959.


— 6- Guillaume Dubois, dit Guillaume Crétin (v.1460 -1525) - Le Debat de deux dames sur le passetemps de la chasse des chiens et oyseaulx - fin du XVe siècle - 1 280 vers décasyllabiques en français - Dialogue sur la chasse s'inspirant fortement du Roman des deduits de Gace de la Buigne.

— 7- Louis de Gouvis - Nouvelin de venerie - fin du XVe siècle - dédié à Charles IV, duc d'Alençon, comte de Perche (1492-1525) - adaptation du Livre de chasse de Gaston Phébus - Manuscrits en français : Paris, Musée du Petit-Palais, Dutuit, 217, XV - In-fol. ms. du xv siècle, sur vélin, avec 20 gr. miniatures et lettres-titres en or et en couleur.

 

Allez, à cheval ou à pied, en avant… le cerf ou la licorne nous attend…

 

" Comment on doit faire l'assemblée "

 

" Comment on doit reconnaître un cerf par les fumures. "

" Comment reconnaître un cerf par ses bois. "

 

Gaston Phébus - Livre de chasse - Paris - XVe siècle
Comment l'assemblée se doit faire en été et en hiver
BnF - Département des manuscrits - Français 616 folio 67

Tandis que les valets déjeunent sur une simple nappe, les guides déposent sur la table de Gaston Phebus les fumées, c'est à dire les crottes du gibier dont ils ont suivi la trace.

La chasse est en route...

" Comment on doit laisser courir le cerf. "

Lucas Cranach l'Ancien - 1529
Chasse au cerf de l'électeur Frédéric le Sage (détail)
Kunsthistorishes Museum - Vienne

La licorne de La Chasse se comporte comme un cerf aux abois.

 

Frise des cerfs de Lascaux (Dordogne) - galerie la nef - 17 000 av.n.è.

Cinq têtes de cerfs peintes (quatre en noir et une en brun foncé) : têtes de profil, ramures vues en perspective, oreilles plantées sur l'encolure.

Les cerfs traversent-ils un cours d'eau, les têtes seules hors de l'eau ?

Ou bien ce " ralenti à effet Marey " décompose-t-il le mouvement d'un seul cerf ?

 

Rester coiffé, malgré la vitesse et le vent !
1- tapisserie 1
2- tapisserie 4
3- détail de la tapisserie
Le Départ pour la chasse - Musée National du Moyen Age - Paris


Le bête traquée parfois se défend et porte des coups qui peuvent blesser ou tuer.

Mais bientôt, c'est l'hallali : l'heure de la mort est proche...

La bête est tuée.

 

 

Après la curée, les chiens ont besoin de soins divers.

 

Un chasseur a-t-il déjà vu le cerf tué ressusciter ?

 

D'après des manuscrits du 17è.s. (BnF, Ms. fr. 7883)


Vennerie

Le Roy a une vennerie qui s'appelle la Vennerie des toiles, là où sont cent archers sous le capitaine des toiles, à cent sols le mois, qui ne servent que de dresser les toiles et portent grands vouges à pie. Et sont tenus les dicts archers, quand le Roy va à la guerre en personne, aller avec lui pour tendre ses tentes, et sont compris du nombre des gardes quand le Roy est en camp.

Et il y a cinquante chariots, six chevaux à chacun chariot, qui ne servent que de mener les toiles partout où le Roy va, et les planchers pour les tentes. Le capitaine a aussi six valets de limiers et douze veneurs à cheval et son lieutenant.

Et est pour l'heure presente capitaine desdictes toiles un gentilhomme de Normandie qui s'appelle Monsieur d'Annebault et a cinquante chiens courans et six valets de chiens pour les panser, et ont pareil traittement aux aultres ci devant, excepté que la dite chasse de toiles ne monte chacun an qu'à dix huit mil francs.

Et pourtant ay bien voulu donner à entendre que c'est de la vennerie de France, pour ce que peu de gens l'entendent.

 

Cy devise de l'estat de la fauconnerie du roy de France

Premierement, la faulconnerie du Roy est une chose ordinaire et a le grand fauconnier qui est un fort bel office en France, et c'est pour l'heure presente ung honeste gentilhomme et de bonne maison qui s'appele René de Cossé, premier pannetier de France.

Le dict grand fauconnier a d'estat quatre mil florins et a cinquante gentilshommes soubz luy qui ont bon estat, et cinquante fauconniers aides, et ont les dictz gentilshommes cinq ou six cens frans d'estat et les aydes deux cens francs ; et depart le dict grand fauconnier tous ces estats et a bien trois cens oyseaux soubz luy.

Et peult le dit grand fauconnier aller voller par tout le royaume de France ou bon luy semble sans que personne luy en puisse donner empeschement, et tous les marchans d'oiseaux luy doibvent tribut et n'oseroient vendre un oyseau en ville du royaulme de France, ny à la cour, sans le consentement du dict grand fauconnier, sur peine de confiscation de touttes leurs marchandises.

Et a le dict grand fauconnier plusieurs beaux droicts, et fault que le Roy luy achepte tous les oyseaux, et a un controlleur, un tresorier et gens ordonnez pour ces paiemens aussy bien que pour la vennerie ou autre estat du royaume de France ; et sont tousjours ordinaires suyvant le Roy partout où il va, aussy bien que font les venneries, osté que, quand on vient à l'esté, ils vont mettre leurs oyseaux en meue, mais tousjours il en demeure quelque nombre pour voller les perdreaux avec les vautours, les lannerets et les tiercelets.

Et y a une autre façon de faire merveilleuse belle entre la venerie et la fauconnerie, car quand ce vient à la Saincte Croy de may, qui est le temps de mectre les oyseaux en mue, les veneurs viennent tous habillés de vert avec leurs trompes et les gaulles vertes et chassent les fauconniers hors de la cour, pour ce qu'il fault qu'il mettent leurs oyseaux en mue, et le temps des veneurs approche pour courre les cerfs à forces.

Et quand on vient à la Saincte Croix de septembre, le grand fauconnier vient à la cour et chasse tous les veneurs hors de la cour, pour ce qu'il est temps de mettre les chiens aux chenils, car les cerfs ne vallent plus rien.

Mais le Roy qui est à présent faict tout autrement, car il chasse hyver et esté et prend beaucoup plus grand plaisir à la vennerie qu'il ne faict à la fauconnerie, et peult monter la despence de la fauconnerie à trente six mille francs, sans l'estat du grand fauconnier.

 

Le livre de Gaston Phœbus :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Gaston_III_de_Foix-B%C3%A9arn

http://classes.bnf.fr/phebus/index.htm

Un site excellent sur les peintures des Cranach père et fils :
http://julie.faure-brac.over-blog.com/article-etudes-des-tableaux-de-cranach-41212302.html
Cliquer sur tous les liens : projet en cours - Article 1 - Article 2 - Article 3 - Article 4

Un site intitulé : Chasse et littérature cynégétique
http://www.arlima.net/ad/chasse.html

 


scènes de chasse - Pompéi

 

tapisserie des Hommes sauvages - v. 1470 -1480 - Historisches Museum - Bâle

 

Un site sur les œuvres d'Emmanuel - Yves Monin relatifs à la chasse
http://e.y.monin.free.fr/articles/chasse3.html
visiter le reste du site http://e.y.monin.free.fr

 

 

 

 

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